l'effet de groupe

Publié le par Moineau

Je ne vous parlerai pas ici du rassemblement acnéique de pré-pubères en révolte post-croissance (du genre l'année où ils ont pris 12 cm et des poils), non pas de ceux-là, le sujet viendra plus tard quand mon fils transformera la cave en annexe du lycée, sky bon marché et roulées comprises : rien que d'y penser, je me sens vieille.

Je parlerai plutôt de ces individus qui par l'effet conjugué d'une volonté délibérée de plaire à leur chef ou répondre à leurs objectifs annuels et un hasard malchanceux, se trouvent réunis quelques heures ou quelques jours dans  une pièce où le café est offert (mais seulement le matin!) et où un intervenant dûment choisi pour ses compétences et son tarif bon marché tente plusieurs heures durant de faire coïncider attentes des uns (fayots), ennui des autres (majoritaires) et présence intellectuelle toute relative des derniers (ils sont aisément reconnaissables : leur tête penche sans arrêt comme vide d'un cerveau qui pourrait la tenir droite).
Je vous vois d'ici crier "au scandale" car ne vous reconnaissant dans aucun de ces archétypes : soyez assurés que vous en faîtes partie ! c'est seulement que votre amour-propre vous interdit de vous y reconnaître. Preuve en est que je suis persuadée d'être l'exception qui confirme la règle (joliment alambiquée cette phrase, le premier qui comprend gagne son poids lunaire en carambars).

Prenez donc un groupe et vous verrez très vite ce que j'en appelle l'effet : la naissance quasi immédiate de quelques profils types, déclinaisons des sous-groupes précédemment énoncés en individus exaspérants (et je sens bien que rien que ma phrase vous exaspère!)

Il y a d'abord la montre : celui-là, souvent un homme, débute ses rituels à H-5 (et en y regardant bien on est toujours à H-5 de quelque chose). Donc à l'heure dite, il rend le stylo qu'il a emprunté. Il n'apporte jamais son propre stylo, ça briserait son rituel. Il rend le stylo donc puis aligne ses feuilles, verticalement d'abord puis horizontalement, s'éclaircit la gorge, cherche du regard un complice (qu'il ne trouve jamais puisque vite identifié, les autres baissent les yeux quand il lève les siens), chuchote pour lui même puis pour les autres puis ne chuchote plus du tout puisqu'il parle maintenant à voix haute et répète à qui veut l'entendre (personne!) qu'il a faim/soif/envie de rentrer chez lui (plusieurs choix possibles selon le moment de la journée).
Quand enfin l'intervenant prend la parole pour libérer le groupe du supplice de la montre, notre bienheureux horloger ne trouve rien de mieux à dire que "euh mais sinon à quelle heure on reprend?"

Le puits de science est aussi un de ces personnages absolument indispensable à l'effet de groupe : il en existe deux versions.
Au masculin, c'est celui qui sait tout mieux que l'intervenant, à croire qu'il a révisé avant de venir (mais alors pourquoi il vient?!!) et qu'il a décidé de coller l'intervenant. Celui-là à l'école il devait déjà être pénible du genre geek avant l'heure. Il ne peut pas s'empêcher de compléter ce qui est dit par de petites digressions sûrement passionnantes pour lui mais tellement ennuyeuses pour nous autres pauvres quidams échoués là (c'était ça ou le plan social).
La version féminine est tout aussi typique : elle a tout vu tout fait tout connu. Au stage alcool elle nous a pourri la vie avec sa grand-mère morte d'une cirhose du foie (Maitre Capello j'ai un doute quant à l'orthographe de cirhose), au stage sécurité routière, elle avait survécu à 5 tonneaux en fiat panda, au stage dissertation elle racontait comment elle avait eu 8/10 en CM1 à sa rédaction qui parlait de son hamster coco (c'est c.. comme nom pour un hamster) et au stage mécanique, elle avouait main sur le coeur (mais à droite le sien, elle confond encore ses mains) comment elle avait perdu sa virginité sur le capot d'une 205 (quand je vous dis qu'elle a tout vécu!).

Il y aussi celui qui pose la question à laquelle on a déjà répondu et qui le fait de préférence quand la montre commence à chauffer sa voix, celui qui est là mais qu'une heure après la fin du stage on a oublié qu'il y était (il était brun ou blond celui-là? chauve peut-être) et tous ces anonymes qui ne rêvent que d'une chose : être à leur tout moteur de l'effet de groupe.


Tout bien réfléchi, ce groupe là n'est pas si éloigné des pré-pubères acnéiques envisagés au début de ce post : c'est seulement qu'eux sont à un âge où on espère encore qu'ils auront d'autres choix que de participer à ces stages.
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